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Il est musulman, elle est chrétienne

S’unir à un homme qui ne partage ni sa culture ni sa religion est de plus en plus fréquent dans notre société. Si certains couples connaissent des échecs douloureux, d’autres parviennent à surmonter leurs différences et à faire triompher le respect de l’autre.

Au début de son mariage avec Catherine, Majid, musulman pratiquant de 29 ans, acceptait volontiers de regrouper plusieurs des cinq prières rituelles de la journée ou de fréquenter des non-musulmans.

Et puis, à la naissance de leur petite Nadia, il s’est brutalement durci dans sa pratique religieuse. De guerre lasse, la jeune femme a demandé le divorce. Depuis la séparation, Catherine vit dans la hantise que Majid n’emmène leur petite fille de 3 ans au Maroc pour rendre visite à sa famille paternelle… et n’en revienne pas (1).

Faut-il pour autant faire de cette histoire particulière une généralité ? Faut-il regarder les unions mixtes entre musulmans et chrétiens systématiquement avec circonspection ?
Cela semble être la position de la Conférence épiscopale italienne, présidée par le cardinal Camillo Ruini. En décembre dernier, elle publiait un document affirmant, entre autres, que « l’expérience des années récentes incite à déconseiller ou, du moins, à ne pas encourager ces mariages ».

Le texte souligne aussi le risque d’une « conception différente de l’institution du mariage » entre une personne catholique et une autre musulmane, ainsi qu’une « vision différente du rôle de la femme ». Déjà en mai 2004, le Vatican avait fait part de ses réserves concernant les mariages mixtes (2).

Savoir accueillir la différence
En France, sur le terrain, les prêtres et les religieuses qui ont pour mission d’accompagner les couples islamo-chrétiens désireux de se marier à l’Eglise adoptent une attitude plus nuancée, à la fois ouverte et pragmatique. Car c’est un fait, les mariages mixtes, au sens large, sont de plus en plus nombreux. Alors qu’ils représentaient 6,16 % de la totalité des mariages civils en 1980, leur part est désormais montée à 15,69 % en 2004 (3).

Le cas de jeunes gens pratiquant des religions différentes et voulant s’unir malgré tout se posera de plus en plus souvent. On ne peut décider de les ignorer. D’autant que l’Eglise catholique autorise tout à fait ce type de mariages, à certaines conditions, il est vrai.

« Pour que mon union avec Fouad, musulman et marocain, soit reconnue par l’Eglise, il nous a fallu demander à l’évêque une dispense pour disparité de culte. Nous avons également dû rédiger une lettre d’intention dans laquelle nous nous engagions à ce que chacun puisse vivre sa religion librement. Je m’engageais aussi à transmettre ma foi à mes enfants », explique Sophie, 31 ans.

Leur mariage a pris la forme d’une célébration sans eucharistie. Des passages du Coran ont été lus, plus particulièrement la fatiha ou première sourate, prière essentielle de l’islam.

« Attention ! remarque le P. Jondot, si ce mariage est valide aux yeux de l’Eglise, il n’est pas pleinement sacramentel. Il ne pourrait l’être que s’il concernait deux baptisés. Sinon, d’une certaine manière, ce serait baptiser indûment la partie non chrétienne », précise-t-il.

L’islam, de son côté, ne s’oppose pas non plus aux mariages entre un musulman et une chrétienne. « Contrairement à certaines idées fausses qui circulent, le Coran n’exige absolument pas que la femme se convertisse à l’islam. Du moment qu’elle appartient à l’une des deux religions du Livre (4), chrétienne ou juive, elle peut épouser un musulman. Et leur mariage sera reconnu ».

« Tout musulman qui voudrait convertir de force son épouse chrétienne serait en contradiction avec le Coran et dans la dérive », insiste Mohammed Benali, responsable de la mosquée de Gennevilliers, dans la région parisienne. Une tolérance qui ne concerne pas les musulmanes – loin s’en faut – puisqu’elles n’ont pas le droit d’épouser un chrétien. Hommes et femmes, deux poids, deux mesures.

La tentation d’un repli idenditaire
L’esprit des textes que nous décrit cet imam modéré est une chose, la manière dont ils sont interprétés par certains croyants en est une autre. Et l’on a peine à ne pas croire à une radicalisation de l’islam, particulièrement chez les jeunes, quand on suit un tant soit peu l’actualité…

« Je suis frappée par une forme de durcissement ces dernières années, analyse sœur Marie-Bruno Laugier, du Secrétariat pour les relations avec l’islam (SRI). Mais ce phénomène n’est pas unilatéral : à mesure qu’on observe une affirmation des croyants musulmans dans notre société, on note aussi des réactions chez certains chrétiens qui se crispent sur leurs valeurs. Il faut par ailleurs reconnaître que se marier avec un musulman peut comporter un risque pour une chrétienne. En France, les étrangers sont souvent rejetés, ils souffrent du racisme, ils ont du mal à trouver du travail malgré leurs compétences et leurs qualifications. Tout cela peut parfois les pousser à se durcir, à se replier sur une conception plus rigide de leur religion », remarque cette petite sœur de l’Assomption.Des couples qui dialoguent beaucoup.

Mieux vaut le savoir, un couple ne partageant ni la même culture ni la même religion ne peut faire l’économie des confrontations et des ajustements. Il serait naïf de croire le contraire. « Dans un couple mixte, une fois les premiers temps idylliques passés, les distances et différences sont vite repérées. S’ensuit alors tout un réseau complexe de crises, plus ou moins importantes », prévient Augustin Barbara, sociologue ayant fait des couples mixtes son sujet d’étude de prédilection (5).

Mais le spécialiste reste optimiste : « Se sachant différents, ces couples vont avoir tendance à beaucoup réfléchir sur leur conjugalité, à beaucoup dialoguer », précise-t-il. C’est en effet la seule voie possible pour que l’union perdure. Très souvent, les crises les plus dures se cristallisent autour de l’éducation des enfants et de la foi à leur transmettre.

« Dans un premier temps, j’ai eu beaucoup de mal à accepter que ma fille ne soit pas baptisée. Pour moi, c’était inconcevable, confie Sophie, catholique pratiquante. Mais, dans la mesure où je n’aurais pas non plus supporté qu’on en fasse une petite musulmane dès sa naissance, je ne pouvais imposer ça à Fouad. C’est une question de respect », précise la jeune femme. Le couple a trouvé une entente en organisant une cérémonie de présentation à Dieu pour leur fillette, axée sur Abraham et le sacrifice de son fils. « C’est vrai que nous n’aurions sans doute pas choisi ce texte pour un baptême ! Mais il correspond bien à nos deux religions, particulièrement à l’islam : on s’en remet à Dieu, on lui confie ce qu’on a de plus cher », explique Sophie.

Si cette catholique et ce musulman cherchent à s’appuyer sur les points communs que peuvent comporter leurs deux religions, ils n’en nient pas pour autant les spécificités. Bien sûr, chacun court le risque que sa religion soit supplantée par celle de l’autre quand l’enfant devenu grand fera son choix. « Si ma fille décide plus tard d’aller vers Dieu par le chemin de l’islam, cela ne me laissera pas indifférente. Mais l’essentiel pour moi est qu’elle soit croyante… » conclut Sophie.

Une situation qui n’est pas sans rappeler ce déchirement que connaissent tant de parents aujourd’hui, y compris chez les couples chrétiens : n’être pas sûr de transmettre sa foi à ses enfants. Mais faire le pari que cela reste possible.

Isabelle Gravillon

(1) Chez les croyants musulmans, le père est le chef de famille, selon une prérogative énoncée dans le Coran. Au Maroc, la récente réforme du code de la famille (2005) consacre l’égalité juridique de l’homme et de la femme et l’autorité parentale conjointe, autorité jusque-là accordée au seul père de famille.
(2) Dans un document intitulé Erga migrantes caritas Christi, émanant du Conseil pontifical pour la pastorale des migrants (2004).
(3) Source : bilan démographique 2005 de l’Insee.
(4) Les chrétiens ne considèrent généralement pas qu’ils appartiennent à une religion du Livre puisque, pour eux, le cœur de la Révélation est une personne : le Christ, et sa Parole.
(5) Auteur de Les couples mixtes, Ed. Bayard, 1994.

Source PELERIN INFO

Cette article est très interessant, je m'y retrouve dedans car avec mon mari nous avons fait une cérémonie à l'église et comme le couple décrit dans ce texte, nous avons du faire du dispense de disparité de culte et exprimé nos voeux par écrit, par contre je ne me souviens pas avoir promis que je baptiserai mes enfants...

Quand ce genre de mariage réussi, c'est un merveille, et heureusement, ce n'est pas rare... Ce sont des modèles de tolérance et de respect mutuel.
Hélas ce qui est "tout beau" au début de la relation tourne souvent au vinaigre... Cela est vrai dans tous les couples, mais ici on a un handicap qui est parfois fondamental... Le problème se posera à l'arrivée des enfants et souvent aussi avec la confrontation avec la belle famille.

Ce que cet article oublie de mentionner, c'est qu'une musulmane ne peut épouser QUE un musulman, et que dans le cas cité (une chrétienne avec un musulman), les enfants devront être éduquée dans l'Islam. Le cas de Sophie m'étonne donc..

(Si je me trompe, dites-le moi! )

je trouve cet article très interessant et qui tombe à point dans la mesure où je me pose des questions sur une éventuelle union avec un non musulman.
quand l"amour est là et bien réel, on s'imagine que rien ne peut le détruire.mais c'est oublier tous ses facteurs qui vont se dresser en travers de notre bonheur. je pense que pour qu'une union mixte puisse avoir une réelle chance de perdurer, il est nécessaire pour le couple de discuter de tous les points qui pourraient devenir source de conflits.
il s'agit de concilier deux religions et cultures différentes. donc il est inutile de faire la politique de l'autruche et éviter d'y penser. et ce n'est nullement évident si chacun a grandi et a été éduqué dans le respect de sa foi. il faut avant tout accepter et respecter la foi de l'autre.
il est difficile de prendre conscience que ce sont deux religions aux pratiques différentes. et cet état se confirme à l'arrivée des enfants. les questions qui naissent sont classiques: la baptème, la circoncision, la nourriture, dans quelle religion le diriger,....Ce sont autant de questions auxquelles il faudra apporter une réponse qui conviendra aux deux parents sans les léser dans leur foi et leur culture.

quand le compromis est trouvé dès le départ et que les deux époux s'y tiennent, on ne peut qu'espérer une union épanouie.

on retrouve également dans tous ses mariages mixtes l'acceptation ou non par la belle famille de cet union. il y en a pour qui c'est une richesse d'accepter une belle fille ou un beau fils de confession musulmane. mais il ne faut pas se leurrer car pour certains, on observe un rejet de l'union par la belle famille. l'époux ou l'épouse se sent alors tiraillée entre deux ètres chers et contraint de choisir entre son bonheur et sa famille.

un autre point sur lequel j'aimerais intervenir, c 'est le refus pas la religion musulmane pour une femme d'épouser un non musulman. pourquoi cette interdiction? j'ai autour de moi des femmes musulmanes qui se sont unis à un chrétien. ce dernier s'est reconverti à l'islam pour pouvoir ètre accepté au sein de la famille. mais j'entends sans cesse autour de moi que cette reconversion n'est pas valide aux yeux de l'islam. je trouve dommage cette infériorité que l'on prète à la femme. mais j'admire les femmes qui se battent pour leur bonheur et passent outre prescription.

en conclusion je pense fermement que la mixité est la solution à l'acceptation des uns et des autres et de leurs différences culturelles et religieuses. je suis contente de constater que les gens sont de plus en plus ouvert et sont prèts à faire des concessions pour leur bonheur.